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« Get up, Stand up », l’exposition contestataire au MIMA

Le MIMA expose cinq années de création prolifique en ses murs dédiés à la culture 2.0. Avec pas moins de 400 affiches contestataires aux cimaises et un succès énorme en termes de fréquentation, le musée prolonge l’expo « Get up, Stand up » jusqu’au 6 janvier. Décryptage.

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Une exposition s’articule d’office autour d’objets, d’œuvres et d’idées n’est-ce pas ? Dans ce cas, il s’agit de l’affiche contestataire entre 1968 et 1973. Cinq années qui ont vu se faire et se répondre de nombreux faits historiques. Son titre, « Get up, Stand up », évoquera certainement pour bon nombre d’entre vous, lecteurs, le titre de la chanson éponyme de Bob Marley et Peter Tosh, sortie le 14 septembre 1973. Tiens donc, justement 1973.

Mais que s’est-il passé précisément entre 1968 et 1973 pour que des affiches aux messages protestataires fleurissent à travers le monde ? Les réponses sont multiples : Mai 68, la guerre du Viêt Nam, la montée du féminisme, de l’écologie et de la poursuite de la lutte des minorités. Ces années ont été marquées par une intense agitation politique et sociale. En Europe, aux États-Unis et dans le monde entier. Des slogans tels que « Sois jeune et tais-toi », « Power to the people », « Make love not war », ou encore « Black Power » ont scandé les aspirations à plus de liberté, de dignité et de justice d’une partie de la population de l’époque. L’affiche a été adoptée grâce à la re-découverte d’une technique qui a rendu possible l’impression à grande échelle de ces dernières : la sérigraphie.

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Un média qui change tout

Alors que c’est une technique ancestrale développée en Asie, la sérigraphie a connu un essor aux États-Unis au XIXe siècle puis elle se propagea en Europe lors de la Seconde Guerre mondiale. Cette technique d’impression qui s’applique sur de nombreux supports (du papier au verre) était pourtant principalement utilisée dans le textile. Le glissement vers le papier permit une production prolifique d’affiches. La sérigraphie a été utilisée à l’école des Beaux-Arts de Paris qui devint l’Atelier populaire le 16 mai 1968… Dans cet atelier naquirent 400 modèles et quelques 300.000 tirages ! Ou comment propager ses idées en quelques mots brefs et incisifs quarante ans avant Twitter et les hashtags…

Odes à la désobéissance

Le parcours de l’exposition s’ouvre avec une ligne du temps qui permet de contextualiser la création de ces affiches. Comprendre leur message et décrypter les enjeux. D’un côté le monde, de l’autre, les États-Unis. Cette ligne du temps n’est pas droite, elle oscille tel le tracé d’un électrocardiogramme qui capte les pulsations de vie… Les pics sont synonymes d’avancées positives ; telle la signature par le président américain Lyndon B. Johnson du Civil Rights Act de 1968 qui condamne, notamment, quiconque qui « par la force ou par la menace de la force, de blesser, intimider ou gêner quiconque… en raison de sa race, sa couleur, sa religion ou son origine ».

Ou encore la publication par le Nouvel Observateur le 5 avril 1971 du « Manifeste des 343 salopes » reprenant la liste des 343 Françaises qui ont le courage de signer le manifeste : « Je me suis fait avorter »…. à l’appel des 330 médecins qui, le 5 février 1973, bravaient eux aussi la loi en s’accusant, dans le même magazine, d’avoir pratiqué des interruptions de grossesse. Aux pics répondent donc des creux qui représentent un certain recul des droits humains ou autre catastrophe telle la chute d’un fût d’insecticide dans le Rhin le 23 juin 1969 tuant 30 millions de poissons ou encore l’occupation, le 20 novembre 1969, de l’île d’Alcatraz par 89 activistes amérindiens. Le commissaire de l’exposition, le collectionneur français Michaël Lellouche de démontrer une sorte d’effet papillon ?

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Le droit des minorités : des femmes, des homosexuels, des mineurs (d’âge), des « Blacks », des Portoricains ou encore des Indiens sont régulièrement bafoués. Des grèves s’organisent et des campagnes de sensibilisation se mettent en place…. Aussi grâce à des affiches.

Quand on parle du message, difficile de ne pas souligner ici son intemporalité. Pour preuve le hashtag #MeToo ou #Balancetonporc (2017), le mouvement Black Lives Matter (2013) ou encore l’appel de Médecins du monde (2014) relayé par l’Obs’ – qui s’illustre dans le combat en faveur de l’avortement à travers le temps – et signé par 420 praticiens à travers le monde pour que « chaque femme, chaque jeune fille ait le droit d’avoir ou non des enfants ». Les propos illustrés graphiquement résonnent diablement justes et contemporains. Même si l’esthétique est d’époque, ce que l’on sent particulièrement dans la salle intitulée Black lights emplie de formes psychédéliques.


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