A la conquête de la Corse

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Des églises de Cargèse aux calanques de Piana, voyage pittoresque entre mer et montagne…

On vient de quitter Ajaccio et la route se met à zigzaguer en lacets. La voiture monte et descend à travers un sublime panorama. Le bitume semble pétiller de l’aubade grandiose donnée par une infinité d’insectes célébrant la lumière, tandis qu’aux alentours, les fragrances dansent dans la douceur de l’air, parfums des mille senteurs du maquis, des fleurs embaumantes du myrte et du thym. « Je vous l’avais dit, vous tomberez amoureux de la Corse » rigole Stéphane, l’un des sémillants attachés de presse de cette île enchanteresse, certain de son pouvoir de séduction universel.

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Le voyage nous emmène dans l’ouest de ce paradis cerné d’eaux cristallines, vers Cargèse. Le ciel fond dans nos yeux, d’un bleu marine sans taches qui évoque l’été. A chaque virage, on prend une claque : que c’est beau ici ! De cette beauté brute, taillée par un déluge antédiluvien d’avant l’Homme. La mer n’est jamais loin. Entre ombres et lumières, on en devine la respiration, son ressac sur la roche, l’intense vibration de sa lame qui a forgé la découpe de ce paysage merveilleux.

Nous allons voir à Cargèse, encore appelé le « village grec », deux églises qui se font face : une latine et une grecque, chacune posée sur un promontoire d’où l’on peut embrasser la mer d’un simple coup d’œil. Deux églises en dialogue pour deux intérieurs : la latine, baroque, avec des décors en trompe-l’œil et la grecque, riche d’une iconostase, une cloison de bois chargée d’images saintes sur fond d’or. On nous rappelle au passage que la Corse n’échappa pas à un déferlement d’envahisseurs, venus notamment de Grèce mais aussi de Gênes.

De l’église grecque monte le chant polyphonique d’un quatuor de choristes masculins en répétition et, soudain, l’âme insulaire de ce peuple d’ici, foncièrement rebelle et indépendant, se met à flotter parmi la myriade d’angelots immobiles.

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On découvre une Corse profondément intimiste et pittoresque, à sa façon d’alterner les ports bariolés, les criques hésitant entre le bleu et le vert émeraude et les promontoires rocheux. Quand les langueurs verdoyantes s’en emparent, ce pays accidenté se recouvre d’une paix infinie gonflée du large, dont la tessiture inspirerait tous les peintres et écrivains du monde. Des îles de la Méditerranée, c’est la plus montagneuse. On dit d’elle que c’est une montagne qui a surgi de la mer. Et dans les plis de sa robe minérale et magmatique, la vie a jailli, fantastiquement sauvage.

Le lendemain, on a dîné sur la plage. En Corse, en un éclair, on peut passer de l’écume frangée de la côte à l’air piquant de la haute montagne. On en a fait l’expérience. Après ce casse-croûte de luxe, avec de la langouste au menu, nous avons repris la route à l’assaut d’un relief en dents de scie. « Cela, il faut le voir au soleil couchant » avait conseillé le guide tout en roulant vers les calanques de Piana, à mi-chemin entre Ajaccio et Calvi. Brusquement, une demi-heure plus loin, on succombe à un effet de surprise : « Chauffeur, merci de vous arrêter ».

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On stoppe et on écarquille les yeux. La route, sinueuse, passe à présent à travers des roches de couleur rouge-orangé, comme taillées à coups de hache, grossièrement sculptées au burin. Le coucher de soleil fait exploser cet ensemble de dentelles granitiques enchâssé dans la mer. Guy de Maupassant y avait vu d’étonnants rochers roses, étrangement torturés, courbés, rongés par le temps, sanglants sous les derniers feux du crépuscule. Depuis 10 minutes, on a quitté la voiture pour cheminer au cœur de cet univers déchiqueté évoquant un canyon américain. On n’en revient pas de l’exotisme de cette carte postale majeure de la Corse, classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Depuis la route, la vue est dégagée pour admirer, au loin, la mer surmontée de hauts récifs, où des lambeaux de nuages blancs sont restés accrochés, tels des drapeaux célestes. Pour profiter du décor, il faut savourer un verre de vin du pays au bar des Roches bleues, en contrebas, dont la terrasse est comme suspendue au milieu de cet écrin de pics saillants.

Nous sommes redescendus jusqu’au village de Piana, avec l’impression d’avoir touché des yeux quelque chose de jamais vu ailleurs, ou de supérieurement beau. Comme on a envie de revoir la mer, on a toujours envie, aussi, de revoir un jour l’île de beauté.

Comité régional du tourisme de Corse:
Tel: +33(0)4 95 51 77 77
Sitewww.rendezvousenfrance.com
www.visit-corsica.com

Napoléon, le Corse

life-magazine-NapoléonAjaccio, fondée en 1492, première ville de Corse, c’était l’étape obligée, parce qu’elle a été l’humble berceau d’un célèbre Ajaccien, l’empereur Napoléon, qui fit accéder ce galet rose posé sur la Méditerranée à une notoriété mondiale. Tout qui pose le pied en Corse ne peut ignorer qu’un peu de l’histoire de France a humblement commencé ici. Nous avons cherché la maison natale du petit Napoléon, au cœur de la vieille ville, là où les rayons du soleil se divisent en autant de faisceaux qu’il y a de ruelles. L’ancêtre de celui qui devint empereur de France était un émigré de Gênes (Italie), qui s’installa à Ajaccio en 1514. Le musée dédié à Napoléon rapporte que le futur empereur quitta sa ville natale pour la France à l’âge de 9 ans, et qu’il n’y revint qu’à 17 ans. Huit longues années passées loin de sa famille et de ses parents, au cours desquelles il ne vit sa mère qu’une fois, cela vous forge un caractère fort. Cette rupture, avec le soleil de Corse, avec sa langue, explique pourquoi, plus tard, Napoléon régna sans concession sur l’Europe. Dans cette maison natale, loin des ors du château de Fontainebleau et des grandes demeures où il exerça le pouvoir, on prend la mesure du destin exceptionnel de ce petit Ajaccien par la taille. « Ce destin de Napoléon, qui fit de Bruxelles une préfecture française, qui inventa le Code civil, le bac et la Cour des comptes et qui incarna la grandeur de la France comme personne, on le voit dans ce paradoxe souligne le guide, entre les 30 m² de la chambre où il est né et la grandeur du lieu où il repose pour l’éternité, aux Invalides, à Paris. Entre les deux, il y a presque 52 ans, l’âge de sa mort. Cette distorsion, en si peu de temps, atteste de ce destin hors du commun à jamais entré dans l’Histoire de l’Europe. »



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