Beauté: S comme soin, slow et science

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Entre une invitation à ralentir, à prévenir plutôt que guérir et un souci de performance, de résultats grâce à la science, voire la génétique, les nouveaux cosmétiques anti-âge oscillent. Mais tous appréhendent désormais le vieillissement à la lumière de l’évolution rapide de nos modes de vie.

Par Isabelle Blandiaux

Entre « faire plus jeune » et « bien vieillir », il y a un changement de point de vue manifeste, qui appelle à aller vers la qualité de vie, la santé, un comportement responsable en matière de nutrition, d’exposition solaire, de stress, de sommeil, de tabac. C’est une marque de cosmétiques en rien biologiques qui se distingue de la promesse d’effet immédiat très fréquente dans les rayons anti-âge. « Le slow aging vient de la nécessité de faire les choses au bon rythme pour bien les faire et obtenir des résultats durables », affirme-t-on chez Vichy à l’occasion du lancement du nouveau soin Slow Âge qui mise avant tout sur la prévention et la protection de la peau via un actif antioxydant (la racine de baïcaline) et des dérivés de probiotiques. Une crème qui s’inspire ouvertement du mouvement slow, né en réaction à l’accélération de la vie et au fast-food dans un premier temps. De quelle manière un produit anti-âge peut-il être ‘slow’ ? Auteur d’Éloge de la lenteur et figure emblématique du mouvement slow, le journaliste londonien Carl Honoré, précise : « Il existe déjà un courant de slow cosmétiques en Belgique, lancé par Julien Kaibeck, qui aborde la façon dont les produits sont fabriqués : avec des ingrédients naturels et de manière durable. Mais pour moi le slow dans l’anti-âge pose aussi une question plus globale. Il faut sortir des cures ‘miracles’ express. La façon dont nous vieillissons est plus importante… Si vous menez une bonne vie ‘lente’, vous vieillirez lentement. Le fait que l’industrie de la cosmétique commence à parler de cela est un bon signe. Un autre signe de ralentissement, c’est l’idée de vivre profondément : ‘Fast is superficial and slow is deep’. Cette métaphore est valable pour les cosmétiques et la façon dont les gens appréhendent le vieillissement : ils ne se limitent plus à compter leurs rides mais ils ont le souci de bien vieillir, avec des activités intéressantes, des relations épanouissantes avec leur famille, leurs amis… Je vais consacrer mon prochain livre au vieillissement, pour changer les stéréotypes, les regards, réinventer notre façon de vieillir… »

Le slow, Carl Honoré y est venu un beau jour, quand il s’est regardé de l’extérieur et s’est vu pratiquer la lecture rapide en racontant l’histoire du soir à ses enfants… « Dans ma version de Blanche-Neige, il n’y avait que trois nains, c’était plus rapide. Avant, j’étais stressé, maintenant que je suis passé de l’autre côté du miroir, je ne sens plus le stress, même en vivant à Londres. C’est possible de ralentir où que l’on soit parce que c’est un état d’esprit. Bien vivre et profiter de chaque instant, quoi qu’on fasse : en mangeant, en travaillant, en faisant l’amour… Rechercher la qualité des instants. Passer de 55 choses par jour à 45. Nous n’utilisons plus assez le bouton ‘off’ de nos appareils – smartphones, tablettes, ordinateurs. Avoir des activités qui invitent à ralentir (le yoga, le dessin, lire de la poésie…) fonctionne comme un vaccin contre le virus de la vitesse, même si cela dure 5 minutes par jour. Ces dernières années, nous savons que nous payons le prix de l’accélération de la vie, du point de vue de notre santé physique et psychique, de l’environnement, de l’économie… Nous avons désormais plus d’espace et de liberté pour ralentir. Les gens n’ont plus honte, ils sont fiers de lever le pied. Travailler moins et gagner moins pour avoir plus de temps à soi. »

L’exposome en question

life-magazine-hygiène Un rythme de vie trop soutenu nuit à la santé et à la jeunesse de l’épiderme, la peau étant l’organe qui protège notre organisme des agressions extérieures. Les laboratoires des cosmétiques anti-âge se focalisent sur l’exposome, donc la mesure cumulative des influences environnementales et des réponses biologiques associées durant toute la vie, incluant l’environnement, le comportement, l’alimentation, le stress, l’anxiété… « L’existence semble continuer à s’accélérer : on veut voyager partout, mener de front la vie de famille, la vie sociale, le travail… Cela prend du temps, donc cela empêche de dormir correctement et de bien se nourrir par exemple. Cela modifie notre façon de vivre. Les scientifiques observent ces changements et analysent les pollutions auxquelles nous sommes exposés. Même si les gens vivent en moyenne plus longtemps, certaines maladies apparaissent plus souvent… », note Patricia Pineau, directrice de la Communication scientifique chez L’Oréal Research & Innovation. « Nous nous sommes penchés sur ce que nous appelons le ‘vieillissement silencieux’, dont on ne voit le résultat qu’après 30 ans. Et nous avons remarqué que le bon moment pour intervenir, c’est lorsque les facteurs de vieillissement sont encore invisibles. Au plus la consommatrice agit préventivement, au plus il y aura de résultats, donc au plus on pourra ralentir le processus. Nous nous sommes concentrés aussi sur la lumière. Les SPF sont utiles quand on s’expose au soleil donc aux UVB mais au quotidien, c’est surtout au rayonnement des UVA qu’on est soumis. Les longs UVA sont les pires, comme l’ont montré nos études sur les gènes. Notre responsabilité est de fabriquer un produit qui protège de cela. »

Les gènes et leur altération au cours de la vie

Les gènes influencent également la façon dont le temps laisse des traces sur notre peau. À l’Anti Aging Center de Bruxelles (www.antiaging-center.be) , on pousse désormais la personnalisation jusqu’à l’analyse génétique pour la réalisation de soins individualisés. « On fait d’abord un bilan Ioma (du nom de la machine utilisée) qui va apporter un diagnostic à partir d’une vision macro/microscopique de la peau (questionnaire sur le mode de vie, mesures du taux d’hydratation, de desquamation, des rides et ridules, du relâchement, de la rougeur, de l’activité bactérienne, des pores obstrués, taches, poches, cernes…). Pour les clientes plus exigeantes, on va plus loin en réalisant un test génétique qui permet de déterminer les éventuels polymorphismes, à savoir les altérations voire mutations génomiques en fonction de l’environnement. Nos pouvons alors intervenir en renforçant le bouclier naturel protéiné gardien du génome par des principes actifs bien spécifiques dans des soins sur mesure de la marque One.Gen/0,1 », détaille Fanny Bretagnon, directrice du centre. « Quand on prend conscience du fait que nos gènes peuvent se modifier au cours de la vie, on essaye de vivre dans l’environnement le plus sain possible en matière de pollution, de nutrition, d’exposition solaire… Notre approche est globale pour donner des réponses précises aux problèmes liés au photovieillissement. »


Article publié dans le Psychologies Magazine


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