L’indivision, ou comment investir à plusieurs

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Un pacte d’indivision bien utile

Acheter à plusieurs peut parfois s’avérer délicat, avec cette épée de Damoclès incarnée par la possibilité de voir une partie souhaiter vendre l’immeuble. Bien souvent, les indivisaires vont conclure un pacte qui empêche la vente du bien. Pour cela, ils vont signer une convention (un acte sous seing privé) dans laquelle ils s’engagent à ne pas demander la vente de l’immeuble avant un certain délai. Les raisons évoquées sont multiples.

Imaginons que vous donnez la maison familiale à vos deux enfants. Vous pouvez leur faire signer un document qui les empêche de la vendre. Même scénario possible pour une maison achetée par deux partenaires. Ceux-ci se séparent, et l’un souhaite rester dans la maison. Il peut faire signer son conjoint pour pouvoir rester dans les lieux le temps de se retourner. Autre cas : l’immeuble acheté va prendre de la valeur avec le temps. L’un des indivisaires peut faire signer les autres parties pour être certain que la vente ne se fera pas rapidement. Dernier exemple : une maison est laissée en héritage à des enfants, majeurs et mineurs. Un pacte peut être signé le temps que les mineurs atteignent la majorité.

Ce pacte protège l’ensemble des indivisaires mais n’est pas un obstacle à la volonté unanime du groupe de vendre le bien. Si la décision de vente est choisie, le pacte n’a plus lieu d’être. Le pacte est également limité à cinq ans. Un délai, raisonnable, et qu’il est possible de reconduire. Sans limite de reconduction.

Quitter une indivision, pas toujours une sinécure

Si les premières années de l’indivision sont souvent vécues comme un long fleuve tranquille, avec le plaisir d’avoir pu acheter ensemble l’immeuble ciblé, la vie se charge parfois de briser les rêves. Que l’on parle d’un divorce, d’une perte de revenus, d’une faillite, ou d’une mésentente entre parties.

Quitter une indivision pourra se faire de deux façons. Si les parties s’entendent sur les modalités, la sortie d’indivision ne sera qu’une formalité. Dans le cas contraire, cela pourra tourner au conflit ouvert avec des procédures judiciaires.

Dans le cas, idéal, où les parties s’entendent sur la volonté de quitter l’indivision, l’immeuble sera vendu de gré à gré, avec le prix de vente convenu ensemble, ou par le biais de la vente publique. Somme toute, le procédé classique d’une vente immobilière, avec remboursement du crédit éventuel et paiement des frais de vente. Et si un copropriétaire désire racheter les parts des autres ? C’est possible naturellement. Il s’agira de ce que l’on appelle une cession de droits indivis. Tout ce qui précède n’est envisageable qu’en cas d’accord unanime des indivisaires.

Seconde option, il n’y a pas d’accord unanime entre les parties pour les modalités de vente. Le dossier sera alors traité par la voie judiciaire. Précisons d’emblée que cette procédure est la moins avantageuse. Autant bien y réfléchir avant de se lancer dans ce parcours semé d’embûches. Et qui débute au Tribunal de première instance pour un dépôt de procédure d’assignation des autres parties. Le Tribunal, dans son jugement, ordonnera la vente du bien, maison ou immeuble, et nommera un notaire pour la vente et le partage du prix de vente.

Une étape qui illustre déjà les frais que va provoquer cette procédure. Et ce n’est pas fini. Si un copropriétaire n’est pas d’accord avec le jugement rendu ou veut ralentir la procédure, tout simplement, il peut aller en appel du jugement. La procédure sera alors suspendue le temps du prononcé de l’arrêt de la Cour d’appel. Soit une nouvelle difficulté à surmonter.
Après cette phase judiciaire qui peut s’avérer longue et coûteuse, le copropriétaire à l’origine de la sortie d’indivision demande au notaire d’entamer la procédure de vente.

Le notaire a encore un rôle à jouer en poussant au dialogue les parties en présence. Il mettra sur la table à la fois les inconvénients de la procédure entamée et les bénéfices de la stopper pour revenir à un accord à l’amiable. A ce stade, tout est encore possible.

Et si le dialogue s’avère vraiment impossible, la procédure reprend, avec la mise en vente publique du bien. Et la possibilité de surenchère. Une procédure de vente qui ne peut être stoppée qu’avec l’accord de toutes les parties. Après la vente, le prix de vente sera réparti selon les droits respectifs des copropriétaires.

Comme cela se comprend à la lecture de cette procédure, dont les coûts et la durée peuvent s’avérer conséquents, il ne s’agit pas de la voie qui sera conseillée par votre notaire. Pour les frais engagés et pour la rupture de dialogue qui subsistera probablement durant un bon moment. Autant savoir.

Et en conclusion ?

Une indivision doit rimer avec attention. Sans jouer les Cassandre, nul ne peut imaginer le futur d’un projet qui semblait idéal à la base. Acheter un bien ensemble, d’accord, mais avec également tous les risques qui composent une vie. Une décision qui peut s’avérer bénéfique mais qui nécessite une longue réflexion avant d’être prise. Une visite préalable chez un notaire semble être de bon conseil au vu de la complexité qui peut accompagner certains cas particuliers, comme une succession. Précisons enfin que ce qui vaut pour le cas d’un immeuble, l’exemple choisi dans l’article, est valable également pour d’autres biens, comme des œuvres d’art ou des titres. Mais ceci est une autre histoire.

 


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