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Réduire ses droits de succession et faire le bien

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Il n’y a pas d’impôt sur la fortune dans notre pays, mais il y a des droits de succession qui, surtout en ligne indirecte ou dans les familles recomposées, peuvent peser lourd. Pour alléger la charge, il y a une technique déjà bien rodée, le legs en duo. « It takes two to tango ». Il y a longtemps qu’on n’avait plus entendu l’expression – depuis qu’un célèbre banquier l’avait utilisée pour justifier une impressionnante fusion – alors qu’elle est célèbre chez nos voisins anglophones. « It takes two to tango », il faut être deux pour danser le tango. C’est vrai aussi en cas de succession, notamment dans le cas du legs en duo.

Par Jean Blavier

Héritage

Lorsqu’un futur défunt – désolé, mais c’est notre lot à tous – désire que ce qui se passe après son grand saut dans le vide se déroule comme il l’entend, il n’y a pas trente-six solutions. Il n’y en a qu’une en fait : il doit rédiger un testament.

S’il ne le fait pas, son héritage sera réparti comme le prévoit la loi. Il a des enfants ? Pas de problème, ils hériteront. Mais c’est la loi qui décidera du partage : chaque enfant héritera de la même chose. Il n’a pas d’enfants ? Là, ça devient plus compliqué. Il n’a pas d’enfants mais sa compagne ou son compagnon en a ? Là, ça devient encore plus compliqué. Or, en matière de succession, si on n’y prend garde, plus compliqué = plus coûteux. Que faire ?

En fait, les choses sont assez simples – au départ du moins. Pour être certain que tout se passe après ma mort conformément à la volonté que j’ai exprimée, il n’y a qu’un moyen : le testament. En l’absence de tout testament, ce sera la règle générale.

Si j’ai trois enfants, chacun héritera d’un tiers. Je ne peux déshériter mes enfants. Toutefois, si je souhaite réserver une part de mes biens à un ou plusieurs autres bénéficiaires, je peux le faire, mais uniquement à concurrence de ce qui reste après que mes enfants aient chacun reçu leur part, qu’on appelle part réservataire. En bonne arithmétique, cela signifie que si je désigne – par testament, rappelons-le, c’est une condition sine qua non – un autre bénéficiaire d’une partie de mes biens, il n’y aura pas trois parts mais quatre. Chacun de mes enfants recevra un quart, tout comme le quatrième bénéficiaire que j’aurai désigné par testament.

Pas en ligne directe

Et si je n’ai pas d’héritiers en ligne directe, que se passe-t-il ? Franchement, c’est impossible à dire – et encore plus à écrire – tant c’est compliqué. Rendez-vous sur le site www.notaire.be ou, mieux, chez le notaire de votre choix. C’est le seul moyen d’éclairer votre lanterne avec un maximum de visibilité.

Les droits de succession sont relativement lourds dans notre pays – sauf en ligne directe et pour autant que votre héritage ne dépasse pas 500.000 euros. Vous trouverez les tarifs par Région – il s’agit d’une matière régionale – sur le site www.notaire.be, ce qui vous permettra de constater qu’au-delà de 500.000 euros en ligne directe et, pire encore, entre frères et sœurs, oncles, tantes, neveux, nièces ou toute autre personne, les tarifs donnent rapidement le tournis – c’est un euphémisme.

Comment ramener ces tarifs à des niveaux plus raisonnables ? C’est ici qu’intervient une technique dont vous avez peut-être entendu parler, le legs, qui permet, moyennant testament toujours, d’attribuer une partie de vos biens à une tierce personne, personne physique ou morale. Pour en savoir plus sur le legs, consultez un autre site, www.testament.be, dont le contenu est d’une remarquable transparence.

photo couple qui a investi dans l'immobilier

Let’s dance

Et le legs en duo ? Nous y voilà. C’est une forme de tango – il faut être deux – auquel recourent surtout – par testament toujours, on ne le dira jamais assez – ceux qui n’ont pas d’héritiers en ligne directe. Le duo est constitué d’un ou de plusieurs héritiers et d’une association reconnue par la loi (Médecins sans Frontières, SOS Villages, la Fondation Roi Baudouin, etc.), ce qui permet d’alléger le montant des droits de succession à payer par le ou les héritiers tout en faisant preuve de générosité.

Prenons un exemple. Monsieur ou madame X, appelons la personne en question indifféremment X, est célibataire et souhaite faire de sa nièce son héritière. Pour peu que X ait bien géré sa barque, la pauvre nièce – le mot est choisi à dessein – va rapidement déchanter. Au-delà de 125.000 euros – ce n’est tout de même pas une fortune -, la ponction est de 60 % en Flandre, tarif maximum. En Wallonie et à Bruxelles, le calcul est différent mais la piqûre tout aussi forte : 55 % de 75.000 à 175.000 euros et 70 % au-delà, tarif maximum.

Pour votre sérénité, ne vous sentez pas obligés de lire ce que coûterait la sollicitude de X à son héritière si celle-ci n’avait aucun lien familial avec le défunt : 65 % dès 125.000 euros en Flandre, idem dès 75.000 euros à Bruxelles et 60 % dès 25.000 euros en Wallonie, le tarif grimpant très vite à 80 %. Ce ne sont plus des droits de succession, c’est de la confiscation. Mais personne n’est obligé de mettre avec complaisance sa tête ou celle de ses héritiers sur le billot.

Exemple

C’est précisément le but du legs en duo. Comme un petit calcul est toujours plus éclairant qu’un long discours, voyons ce que donnerait un legs en duo dont les bénéficiaires seraient une nièce de X et une association reconnue. X souhaite léguer 175.000 euros à sa nièce. Inutile de vous dire que la somme que touchera la nièce va d’abord passer à la moulinette fiscale. Il n’en restera pas grand-chose. Par contre, X peut faire don à l’association de son choix (une œuvre de bienfaisance, mais aussi une université, une ONG…), des 175.000 euros dont il dispose, mais à une condition : que sa nièce touche par exemple 100.000 euros. C’est nettement plus que ce qu’elle aurait pu espérer au tarif normal.

Est-ce de la magie post mortem ? Pas du tout. Le legs en duo joue sur deux tableaux, le tarif préférentiel dont bénéficient les associations reconnues par la loi, grosso modo de 7 à 8,5 % en Flandre et en Wallonie, davantage à Bruxelles hélas (jusqu’à 25 %) et le caractère dissuasif des droits de succession dès que l’on quitte la ligne directe.

Il faut évidemment que la volonté de X soit double, elle aussi : favoriser sa nièce ET faire preuve de philanthropie. Certains petits malins utilisent le legs en duo à des fins peu compatibles avec l’esprit de la loi. Dans un tel cas, l’association bénéficiaire peut tout simplement renoncer à l’héritage de X. Avec pour conséquence que sa nièce en paiera le prix – le prix fort.


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